Première partie : Voyage en Inde du sud du 30 mai au 1er juin 2011

Le 30 mai

Réveil à 5h. Départ matinal de Lyon Part-Dieu. Agnès me fait une petite frayeur : elle a oublié les papiers de réservation pour récupérer les billets. On nous les donne quand même au guichet. Elle les retrouvera plus tard dans une de ces pochettes. Tout le monde est ému au départ du train. Nous étions accompagnées de nos proches.

Arrivée à Roissy, nous apprenons que l’avion a 1 h 30 de retard. Pas top. Nous arrivons donc à Bombay dans la chaleur et la moiteur à 2 h 30 au lieu de minuit. Et bien sûr, les bagages ont été longs à parvenir sur les tapis roulants. J’ai même pensé qu’ils étaient perdus.

Encore une petite frayeur. L’inconnu et la fatigue amplifiant mes états d’âme. Je me rassure et bien sûr les bagages finissent par arriver. Chasse au taxi déjà « folklo ». La nuit grouille encore de monde et les Klaxons raisonnent sans cesse. Les gens pauvres, maigres et hagards errent ou dorment à moitié nu sur le trottoir. Impressionnant ! Chiens errants aussi maigres. Tout semble sale, en friche… Une autre planète. Je suis éberluée pour ne pas dire choquée de ce que je vois et j’en oublie ma veste dans le taxi. Je m’allège.

Arrivées à l’hôtel (pas top) dans la banlieue (pas top). Nous sommes à une demi-heure de l’aéroport. Heureusement vu l’heure tardive. Chambre à peine correcte. Mais bon. Ce n’est que pour deux nuits. Il est difficile de réserver de France. Le centre de Bombay aurait été plus accueillant. En même temps cela nous permet de voir cette réalité. Il y a un chantier en face : ils travaillent même la nuit. Un peu bruyant. Les conditions de travail ne sont décidément pas les mêmes. Rien n’est pareil.

 Le 31 mai

Réveil de bon matin sous les bruits du chantier à côté de l’hôtel. Il est 10 h. Pas de petit déjeuner. Agnès est sûre que le petit déjeuner était compris dans la réservation, mais … Départ pour la gare juste à côté. Odeurs et saletés. Incroyable !  Nous arrivons tant bien que mal à nous faire comprendre et nous prenons un train pour le centre de Bombay. 

Agnès est plus douée en anglais /indien que moi. Train sans confort. Compartiment pour les femmes. Les portes sont ouvertes. Grilles aux fenêtres. Banc en bois. Des ventilateurs sont accrochés au plafond du wagon. Peu fonctionnent. Arrêt soudain du train : Il y a un accident sur la voie. Une femme est apparemment passée sous le train !!! J’hallucine. « Welcome ». C’est un pays où la mort semble rôder partout dans l’indifférence générale.

Tout le monde essaie de savoir. Agitation dans le wagon et blabla et blabla… Les femmes se penchent aux portes pour entrevoir, quoi ? Je regarde les saris colorés aller et venir et regarder dehors d’une porte à l’autre. Agnès se joint à elles et moi, je reste scotchée sur mon siège. Impossible de me lever. Je réalise que je suis en voyage en Inde du sud. Cela me suffit. Je l’intègre.

Waouh ! J E  S U I S  E N  I N D E !!!

Arrivées dans le centre-ville anciennement à la gare Victoria station. Ancien quartier anglais. Quel état !!! Et une circulation infernale toujours ponctuée de Klaxons. A la gare, nous sommes obligées de patienter à trois guichets différents pour trouver celui où nous pourrions acheter notre billet via Goa.

Nous nous frayons un passage d’un bout à l’autre de la gare avant de trouver un aimable employé qui nous explique comment aller à Goa. Nous n’avons pas suffisamment d’argent sur nous. Direction une agence de change. Cependant, nous ne revenons pas de suite à la gare : balade et petit casse-croûte.

Nous n’osons pas encore les spécialités servies dans la rue. Direction fast-food genre la brioche dorée. Ouf, il y a la climatisation et c’est propre. Nous savons que nous ne retrouverons peut-être pas ce petit confort lors de notre périple. Petit pain grillé au fromage fondue et pimenté et un thé.  Nous décidons de changer de quartier.

Bain de foule, taxis noirs et jaunes comme dans une ruche. Il y en a de partout. Ils conduisent comme des fous du volant. Seul le Klaxon les signale. « Too much » ! Il suffit de s’y faire. J’aime déjà les indiens et leur regard profond parfois bleus. Étonnant !

Ils sont très serviables mais ont tendance à nous indiquer la mauvaise direction. Oups ! Vérifier une fois voire même deux toutes réponses. Je ne compte plus le nombre de demi-tour que nous avons dû faire.

On marche, on marche ! Ce n’est pas facile de trouver le bon bus au bon endroit. Tout semble en désordre et il n’y a aucune logique. En tout cas, je ne saisis pas tout. Help Agnès !!! Malgré son savoir-faire de globe trotteuse, elle s’y perd aussi. Mais nous avons du temps et de la patience à revendre alors tout rentre toujours dans l’ordre.

Il y a énormément d’hommes et beaucoup moins de femmes. Elles travaillent un peu dans les bureaux de banque et dans les boutiques. Mais il y a surtout des hommes. C’est impressionnant au m².

Direction Colaba, en bus. Un grand moment aussi. Ce quartier de Bombay semble plus aisé. Grands hôtels face à la mer et grosses voitures. Nous nous promenons sur une place très touristique. Toute une famille « couleur locale » souhaite être prise en photo avec nous. C’est trop marrant. Les unes après les autres en sari vif orange.

Elles nous tiennent les mains, par l’épaule. Fières de nous approcher, de nous toucher et de ramener ces « souvenirs clichés ». Nous nous prêtons au jeu, un peu surprises quand même de notre succès. Nous avons bien ri.

Dans un taxi que nous avons partagé avec une famille, le chef de famille a voulu me prendre en photo avec sa femme voilée et ses deux jeunes fils. Il lui a demandé de poser son voile pour la photo.

Elle avait l’air intimidé. Cela semble curieux pour eux de voir deux femmes en balade. Peu d’occidentaux dans les rues. Peu d’hommes en tenue indienne. Il semble que les coutumes se perdent là aussi. Cependant, dans le train les « teen-agers » ressemblent parfois à celles de notre pays. Mp3 et téléphone portable sont à la mode ici aussi. Les femmes, elles, sont vêtues en sari.

Retour à la gare pour apprendre qu’il n’y a plus de place pour aller à Goa le lendemain ni le surlendemain. Seulement en seconde. Hic ! En compartiment mixte à quatre. Impensable ! Enfin pour moi. Agnès se serait laissé tenter. J’ai du mal à me rendre compte de la promiscuité de ce genre de compartiment. 

Ce que j’ai vu des trains jusqu’à présent ne me met pas en confiance. Enfin, nous aurions peut-être dû revenir plus vite à la gare. Chacun s’occupe de nous gentiment. On nous trouve un opérateur « internisé », à l’extérieur de la gare, qui nous propose le voyage de nuit par autocar. C’est ok. Pourvu qu’on parte de Bombay bruyante, polluée et poisseuse. Le bain de foule a ses limites. Quelle moiteur ! Comme si le temps était à l’orage.

Petit tour dans un bureau « internet » au fond d’un couloir. Odeurs nauséabondes. Bureau confort. Le net pour donner de nos nouvelles. Puis, il est temps de rentrer. Heures de pointes. Pas de taxi disponible, bus sur bondé. Nous réussissons à monter. Bousculade. Incroyable cette masse de gens vraiment pas dans la « british attitude ».

Nous sommes mal renseignées. Mauvais bus. Nous partons à l’opposé direction la mer « by night ». C’est beau, les buildings se dessinent à l’horizon dans le coucher de soleil. Les beaux quartiers d’affaire sans doute.

Demi-tour ! Cette fois, nous sommes bien renseignées par un jeune homme charmant. Globalement tout le monde est charmant. Il est tard. La nuit tombe. Encore une demi-heure de bus jusqu’à la gare. Nous intriguons. Notre blancheur, notre blondeur ? Il y a du monde partout.

Enfin la gare, mais quel train prendre ? Quel quai ? Ouf ! Nous sommes de nouveau bien renseignées.

Vieux monsieur : c’est un Vieil Indien aux yeux bleus et à l’anglais parfait. Il nous parle et s’occupe de nous rassurer. Nous devions avoir l’air un peu perdu. Des jeunes viennent vérifier qu’il ne nous importune pas. Tout ok. Il est très courtois même s’il a une allure un peu clodo.

Dans le train, même ambiance très féminine. Certaines vendent à manger, d’autres des bijoux de pacotille. Nous nous renseignons pour l’arrêt. Encore un peu peur de se louper. Il est tard et nous sommes fatiguées. À l’hôtel à 21 h 00. Nuit noire. Ambiance devant la gare. Pas vraiment faim. Odeurs prenantes.

Nous décidons d’aller nous doucher puis de sortir manger. Pas le courage en fin de compte. Nous n’avons pas bien faim en fait. Trop chaud. Trop de fatigue. A cette allure nous allons fondre. Nous nous reposons alors !!! Minuit ! Agnès tout feu, tout flamme, (réveillée par trois télévisions à fond) part chercher le réceptionniste pour stopper tout ce vacarme. Jamais nous n’avions entendue des télévisions avec le son monté aussi haut. Ils dont « dingues » dixit Agnès. Réceptionniste efficace. Dodo !

 Le 1er juin

Départ de l’hôtel. La gare est encore plus bondée que la veille. Il y a beaucoup de jeunes enfants qui mendient. J’évite leur regard. Je ne sais vraiment pas quelle attitude avoir. Nous sommes prévenues de ne pas trop céder à la mendicité (mafia ?). Un jeune homme nous aborde pour bavarder. Il nous donne quelques conseils sur Goa. Notre prochaine destination.

Le train, je n’en parle même pas. 2ème classe, « wagon ladies ». Vue sur les bidonvilles. Amas de plastiques tendus, de tôle et de parpaing « pèle mêle ». Un désordre total. Une anarchie odorante. On n’imagine pas ce que c’est. Et pourtant c’est leur réalité. On est serrée comme des sardines dans ce train. Il faut se caser avec nos sacs à dos encombrants.

Nous sommes assises heureusement. Elles sont étonnamment propres et sentent bon par rapport aux conditions de vie. Je me sens déjà poisseuse. Je pense que nous avons affaire à des femmes de la classe moyenne. Les gens de la rue ne s’aventurent pas dans le train.

J’ai l’impression d’une certaine indifférence à leur égard. Ils n’existent pas plus que les chiens errants. Leur nombre banalise cette pauvreté sans commune mesure.

Arrivée à Victoria station. Forte empreinte anglaise. Rebaptisée, mais trop long d’écrire le nom indien. Le même jeune homme nous retrouve à la descente du train. Tout le monde nous observe. Nous cherchons les consignes. Une femme nous guide. Même pas la peine de demander. Elle est heureuse de nous rendre service. Elle nous aborde très spontanément.

Nous pourrions croire qu’elle fasse partie du personnel de la gare. Genre hôtesse d’accueil. Habillée en sari, le regard et le sourire engageant. Elle semble connaître le personnel de la consigne. Mon anglais approximatif m’empêche d’assouvir ma curiosité. Je laisse là ce mystère. Nous laissons aussi nos bagages. Il y aura d’autres « belles âmes » sur notre route comme arrivée de nulle part mais au bon moment pour nous guider.

Je n’ose pas prendre des photos. Peur de me faire voler mon iPhone. Dommage il y a des visages comme nul part ailleurs. La foule est trop dense. Je fais attention à mon sac. J’aimerai me laisser aller à plus de confiance. Les mises en garde du guide du routard et « dame prudence » prennent le dessus. Dommage cette légère tension. L’inconnu de cette ville gigantesque et grouillante a raison de ma spontanéité habituelle.

Taxi via Colaba bord de mer. Nous n’avons pas mangé depuis la veille midi. Il est midi. Petit déjeuner à la française ou plutôt à l’anglaise dans un salon très classe, nommé « le pain Quotidien ». Quelques noms en français sur la carte. Décor à l’anglaise. Balade dans les rues surchauffées. Balade sur le long de la mer. On se croirait à Nice. « Like la promenade des anglais ».

C’est surtout moins bien entretenu et moins prestigieux. Nous avons abandonné notre projet d’aller sur « l’île Éléphanta » voir ses singes et ses sculptures par manque de temps. Nous envisageons de le faire au retour à la fin de notre voyage car nous repasserons par Bombay.

Tiens ! Nous retrouvons le jeune homme de la gare ! Accompagné d’un ami qui commence à draguer Agnès. Nous nous débarrassons d’eux.

Ah! Une exposition d’artistes indiens de Calcutta. Moderne et originale. Nous sommes reçues comme des invitées de marque. Ils pensent que nous sommes des acheteuses potentielles. Vraiment de belles sculptures et tableaux. Pas de place dans le sac à dos ! Pas les moyens non plus.

Bon, il est temps de retourner chercher nos sacs à dos. Juste une pause « for a cup of tea « . Et là de nouveau le jeune homme de la gare. Rencontre « synchronicité ». Trois fois dans une ville comme Bombay !!! Non ! Nous ne le prendrons pas dans nos bagages. Nous lui offrons seulement un café. Il est un peu déçu. Pas nous !

Taxi ! Consigne ! Nous nous préparons pour le départ pour Goa.

Sac à dos (11 kg). Obligé avec tous mes produits de soins. Moi, une « princesse aux petits pois » !!! N’empêche que là, je suis couchée dans un autocar en partance pour Goa. 12 h de car, allongée. Voyage de nuit. La literie ? « Ce n’est pas le top me dit Agnès ». Ma colocataire de lit bus. Nous en rions. Bruit, circulation, odeur de cigarette. Un pneu dégonflé, mais c’est l’aventure. Agnès ne peut pas dormir. Et moi non plus. J’écris ! Agnès m’aide !

La suite du voyage en Inde du sud : Couleurs et contrastes en Inde du sud seconde partie